Validité des travaux de désamiantage imposés à ERDF et GRDF
Afin de garantir et de sécuriser les déplacements sur l’ensemble de son territoire, le Département d’Indre-et-Loire, qui gère, aménage et entretient un réseau de plusieurs milliers de kilomètres de routes départementales, a décidé d’adopter un nouveau règlement de voirie.
Adopté par une délibération du 20 juin 2014, ce règlement visait à la fois à clarifier et à simplifier les demandes d’autorisation publiques, privées ou professionnelles relatives aux travaux nécessitant l’occupation temporaire ou définitive du domaine public routier départemental. Le Département entendait ainsi préserver son patrimoine routier, assurer une coordination efficace des travaux et garantir les conditions de remise en état du domaine public routier départemental selon des critères prédéfinis.
Par deux requêtes, que le Tribunal a jointes pour statuer dessus, les sociétés ERDF et GRDF, respectivement concessionnaire de la distribution publique d’électricité et de gaz naturel sur le territoire du Département, ont sollicité l'annulation de l’article 82. Ces dispositions visaient, dans le respect du Code du travail et de la réglementation relative à l’interdiction de l’amiante, à mettre en place une disparition progressive de certains enrobés formant la chaussée de la voirie départementale et qui sont composés de constituants dangereux et interdits. Elles s’appliquaient tant au Département qu’aux concessionnaires ou propriétaires de réseaux publics ou privées quand ils réalisent des travaux sur la voirie départementale. Elles prévoyaient notamment que « les concessionnaires ou les propriétaires de réseaux publics ou privés sont responsables (des) recherches d’amiante et teneur en HAP préalablement à leurs travaux dont les résultats doivent être fournis aux entreprises qui interviennent pour leur compte et au service gestionnaire de la voirie départementale ». Elles prévoyaient également la réalisation de nouveaux revêtements respectant la réglementation.
Le Tribunal administratif d’Orléans a rejeté la requête après une étude minutieuse des moyens soulevés par les sociétés requérantes.
Selon celles-ci, l’article contesté avait pour effet de modifier les règles relatives à la gestion des déchets, contenues pour partie dans le Code de l’environnement. Le Tribunal a estimé pour sa part que « même s’il rappelle qu’il convient de prévoir ce qu’il faut faire en présence d’amiante, ou d’HAP, il ne comporte, par lui-même, aucune mention relative à la gestion des déchets qui résulteront de ces travaux et à la détermination du débiteur final du coût financier de leur traitement ». En outre pour juger que l’article 82 n’a pas porté une atteinte excessive aux droits des requérantes d’occuper le domaine public en leur imposant, lorsqu’elles interviennent sur la voirie routière pour réaliser leurs travaux, de réaliser la recherche d’amiante et de la teneur en HAP préalablement à de tels travaux, le Tribunal a relevé que « que, d’une part, les dispositions de l’article 82 du règlement de voirie n’ont pas méconnu l’obligation incombant, du fait l’article L.131-2 du code de la voirie, au département d’assurer la charge normale de l’entretien de la voirie routière dès lors que dans l’hypothèse envisagée par l’article 82, les travaux ne seront engagés que dans l’intérêt des réseaux appartenant aux sociétés concessionnaires ; que, d’autre part, ces travaux sont à la charge du maître d’ouvrage des réseaux, y compris les modifications, quand elles sont la conséquence d’autres travaux entrepris dans l’intérêt du domaine public occupé et conformément à sa destination ». Ce faisant le Tribunal a tenu compte du fait que l’article 82 ne s’appliquant aux sociétés requérantes que dans l’hypothèse où elles devaient réaliser des travaux dans l’intérêts des réseaux qu’elles exploitent, travaux qui sont en tout état de cause à leur charge. Enfin, le Tribunal a rappelé que les occupants du domaine public ont une obligation de remettre en état l’emprise des travaux effectués sur leurs ouvrages. A ce titre, il a estimé qu’il leur appartient de supporter les surcoûts qui pourraient résulter de cette remise en état « même quand, comme en l’espèce, une réglementation plus exigeante conduit, sans autre alternative possible, à la réalisation de nouveaux revêtements non pollués et apporte de fait une plus-value au domaine public ».
Ce faisant, le Tribunal administratif semble avoir tenu compte de l’obligation des requérantes de tenir compte des stipulations du cahier des charges annexé au contrat de concession signé avec la ou les autorité(s) organisatrice(s) de la distribution d’électricité ou de gaz naturel compétente(s) sur le territoire du Département. Or, il y est usuellement stipulé que l'exploitation des ouvrages de la concession est assurée par le concessionnaire, à ses frais et sous sa responsabilité, comprenant les travaux de maintenance, de renouvellement et de mise en conformité des ouvrages avec les règlements techniques et administratifs ou encore le fait que le concessionnaire est tenu de se conformer aux dispositions des règlements de voirie locaux. D’ailleurs, les concessionnaires prévoient l’existence de ces coûts dans les barèmes qu’ils publient pour la facturation des travaux de raccordement au réseau. Par surcroît, l’ensemble des coûts supportés dans le cadre de leur mission de service public, dont ceux liés aux travaux sur le réseau, sont couverts à la fois par le tarif national et par la contribution facturée au titre des raccordements en application du barème susmentionné.